Pour débuter un bon repas, rien ne vaut quelques mises en bouches qui non contentes de chauffer un peu le palais donnent envie d’aller plus loin et d’en savoir plus… Il en va de même d’un bon cours qui, idéalement, débute par une entrée en matière qui pose le cadre de la séance et éveille la curiosité des élèves… ne parle-t-on pas de l’appétit d’apprendre ?
Classe de 5ème, éducation à la citoyenneté, cours sur l’égalité. Les élèves à peine installés, le professeur passe dans les rangs et distribue, sans explications, de manière aléatoire et très inégalitaire des … bonbons… On a certes vu plus orthodoxe comme introduction mais pour ma part j’ai rarement élaboré activité plus efficace !
A peine la distribution terminée, les questions fusent et le débat s’engage. Des critiques sur la distribution telle qu’elle a été effectuée on passe assez rapidement à des propositions très concrètes sur la façon dont elle devrait être corrigée. Très vite également on passe des réflexions pratico-pratiques sur les bonbons à des questions plus générales sur l’égalité, l’inégalité, la discrimination… qui posent le cadre du chapitre à venir : Pourquoi faudrait-il partager les bonbons de manière égale entre tous ? qu’est-ce que l’égalité ? que sont les discriminations ? Pourquoi considérons-nous l’égalité comme importante alors qu’à d’autres époques les inégalités apparaissaient comme normales ? Et les élèves de cinquième dégagent eux-même et quasiment sans aide la problématique du cours d’éducation civique.
L’autre aspect intéressant est que ce sont tous les élèves de la classe qui participent activement au débat et qui en saisissent les enjeux parce qu’ils sont, à cet instant, concrets et arrimés à leurs propres préoccupations. Cet engagement initial n’est certes pas la garantie que tous les élèves, ensuite, seront motivés par ce chapitre mais c’en est en tous les cas une condition importante.
Petit conseil technique en cas de manipulation de bonbons : pensez à interdire toute consommation avant la fin du cours. C’est une condition indispensable pour pouvoir récupérer tous les bonbons et les redistribuer, après discussion, de manière plus conforme aux valeurs de la République !
Autre exemple en 4ème pour entamer le chapitre sur les enjeux de l’information. Les élèves reçoivent deux bulletins de vote : l’un d’un séduisant play-boy proposant des mesures très démagogiques aptes à séduire aisément de jeunes élèves (par exemple payer les collégiens) et l’autre d’un monsieur beaucoup moins sexy et aux propositions beaucoup moins attirantes mais nettement plus réalistes. Une élection à main levée est alors organisée. Lequel des deux l’emporte ? Bien évidemment c’est le premier des deux candidats qui est élu haut la main. Seuls quelques élèves choisissent l’autre. Quelques uns parce qu’ils sont plus méfiants que la moyenne se disent qu’il y a anguille sous roche ! Les autres, mieux informés, ont reçu discrètement avant l’élection un petit article de journal, qu’ils ont interdiction de dévoiler, évoquant la mise en examen pour de multiples escroqueries du premier candidat. Ceux-là sont sincèrement malheureux de voir la grande majorité de leurs camarades s’engouffrer dans le piège et leurs mimiques désolés en disent long ! Après le vote ceux qui ont été piégés sont vaguement gênés de s’être laissés berner, même pour jouer.
Comme dans l’exemple précédent, le débat qui s’ensuit permet de poser clairement l’intérêt du thème et la problématique qui va guider le travail. Là encore, ce sont tous les élèves qui sont impliqués dans cette étape car ils ont tous été actifs lors de la mise en situation.
Ces activités, très courtes sont destinées à enclencher une dynamique en début de séance ou de chapitre et jouent le rôle de starters. A l’évidence, elles ne sont pas des jeux. Elles ne durent que quelques minutes, sont très simples à mettre en œuvre, ne demandent quasiment aucun matériel et ne comporte pas d’enjeu de réussite. Il s’agit de mises en situation, de simulations, parfois de petits pièges bienveillants, ludiques parce qu’amusants, intrigants, déroutants, surprenants, déstabilisants (mais sans excès). Ces starters sont pédagogiquement efficaces quand ils stimulent l’appétit d’apprendre de nos élèves et qu’ils les amènent à repérer leurs besoins ou à se décentrer par rapport à leurs représentations préalables. Ils sont particulièrement bien adaptées à l’éducation civique mais on peut tout à fait en élaborer pour certains thèmes d’histoire ou de géographie. Ils ont enfin la vertu de contribuer à créer, progressivement au cours de l’année, une ambiance de classe agréable et détendue mais néanmoins studieuse. Beaucoup de ces activités comportant une part de discussion libre et collective, il est facile de les utiliser pour poser les règles de la prise de parole et de l’écoute en classe ainsi que les procédures du débat argumenté. Bref beaucoup d’avantages pour peu d’inconvénients.
Un dernier exemple pour la route ? Voici une variante sur les enjeux de l’information…