Faites vos jeux

Après avoir parcouru sans relâche ce site, vous avez pris une grande décision : créer votre jeu pour votre classe. Mais comment s’y prendre ? La tâche est en effet complexe et parfois décourageante, ne sachant pas par où commencer…

Cette page a pour but de vous aider à ne pas perdre trop de temps et d’énergie dans cette louable entreprise, en explorant quelques pistes (qui ne sont pas forcément à consulter dans cet ordre) : certains jeux sont des modèles et peuvent servir d’inspiration (révisons nos classiques), un petit aide-mémoire de ce qu’il faut prendre en compte et de la démarche à suivre (je sais créer mon jeu en 10 leçons), quelques ressources complémentaires sur le web pour les concepteurs de jeux (la boîte à outils) et les conseils de menée en classe (les 10 commandements du meneur de jeu).

Révisons nos classiques

Certains jeux sont des références ludiques. Vous les connaissez presque tous et ils sont sûrement en partie dans un de vos placards. Ils permettent de balayer les principales options ludiques qui s’offrent à vous dès que vous voulez créer un jeu. Vous trouverez sûrement dans cette liste de grands classiques ludiques le type de jeu dont vous voulez vous rapprocher (sachant qu’il est évidemment possible d’en combiner leurs ingrédients).

Le TRIVIAL PURSUIT est un des jeux les plus répandus. Pourtant, la mécanique ludique est des plus rudimentaires puisqu’il s’agit de bien répondre à un maximum de questions de culture générale. Les joueurs jouent les uns après les autres et se posent entre eux les questions. Le plateau est complètement abstrait et on s’y déplace au hasard. Ce jeu est souvent pris comme modèle par les enseignants qui veulent faire créer un jeu à leur élèves : règles simples, parcours limpide, jeu d’émulation facile à transposer sur un domaine de savoirs. Beaucoup de jeux du commerce s’en inspirent, parfois en inventant un plateau un peu plus pertinent (par exemple, le jeu d’émulation Bioviva sur les milieux naturels fait déplacer les pions des joueurs sur un planisphère des zones biogéographiques).

Le MONOPOLY est l’archétype des jeux de parcours. L’espace est très stylisé (les rues deviennent des cases). Les joueurs en prennent le contrôle en construisant maisons et hôtels. Certaines cases permettent d’intégrer le hasard pour dynamiser la partie. Le tour de jeu est des plus classiques : les joueurs jouent après les autres, ils se déplacent au dé et il y a assez peu d’interactions entre eux (elles se limitent à des prises de loyers). La plupart des jeux de plateau s’en inspirent (parcours fermé divisé en cases, forte part du hasard, interaction limitée à la compétition). Pour la petite histoire, ce jeu a été inventé lors de la Grande Dépression aux Etats-Unis et il a été refusé à l’époque par de nombreux éditeurs…

Le MILLE BORNES est un modèle du genre : tout se joue avec des cartes et rien qu’avec les cartes. L’obstacle de la fabrication du plateau disparaît : c’est une option qui peut s’appliquer à beaucoup de simulations. De plus, les actions des joueurs se résument à deux actions possibles : progresser ou gêner les autres. C’est donc un modèle d’équilibre jouabilité / réalisme, transférable à un grand nombre de jeux. Des jeux de cartes très célèbres chez les adolescents comme Magic ou Pokémon ne sont que des reprises de ces principes de jeux (tout est sur les cartes, deux actions possibles).

RISK est un jeu de plateau de conquête, plutôt à l’époque napoléonienne (sans que cela soit explicite) mais à l’échelle mondiale… du moins dans sa version de base car de nombreuses variantes ont été commercialisées. Les règles sont assez simples et le tour de jeu est classique (les joueurs jouent les uns après les autres). Le principal intérêt de ce jeu est de proposer un plateau « réel » et pas abstrait (même si le planisphère est considérablement déformé…). Tous ceux qui y ont joué souvent savent désormais où se trouve le Kamtchatka ! L’apprentissage par imprégnation peut en effet faire aussi partie de l’objectif du jeu. La victoire s’obtient par une combinaison de stratégie (fort élémentaire) et de chance aux dés, mais l’autre innovation est l’objectif que les joueurs tirent secrètement en début du jeu. Il n’est néanmoins pas assez élaboré et trop fantaisiste pour qu’on puisse parler de « jeu d’histoire » ou « wargame ».

Ce jeu est sans doute le moins connu du grand public. DIPLOMACY fait s’affronter jusqu’à 7 joueurs pour la domination de l’Europe au début du 20e s. Ce jeu est considéré comme un modèle absolu par les joueurs avertis : des règles simples, un plateau exact (l’Europe en 1900), un matériel limité à sa plus simple expression (trois types de pions seulement) et surtout un système de jeu révolutionnaire. Les joueurs jouent en effet tous en même temps : ils négocient librement entre eux avant de rédiger leurs ordres (c’est à dire comment ils déplacent leurs pions sur le plateau, d’où le nom du jeu) et leur résolution ne fait appel à aucun hasard (il n’y a pas de dé !). Cette résolution des ordres se fait en même temps pour tous les joueurs. Ce jeu a connu un succès mondial (il suffit de taper «diplomacy + game» dans un moteur de recherche pour trouver des dizaines de variantes et de parties par correspondance). Diplomacy a aussi l’immense avantage d’être jouable sur plusieurs mois (à raison d’un tour par semaine par exemple). Il a été vendu par différents éditeurs en France, d’où des boîtes différentes. Diplomacy est un modèle jamais égalé d’équilibre jouabilité / réalisme, prouvant qu’avec des règles simples, on peut quand même aboutir à des situations historiques fiables (comme les Balkans régulièrement disputés entre la Turquie, la Russie et l’Autriche-Hongrie par exemple).

Les jeux de 7 FAMILLES ont un immense avantage : tout le monde connaît la règle. Ce type de jeu permet de « travailler » la classification de faits, d’objets, de personnages… Les jeux de 7 familles à thème historique sont très nombreux dans le commerce (notamment dans les boutiques des musées) : idéal pour commencer une collection. Mais l’intérêt du jeu est assez limité, surtout quand les cartes ne demandent pas de lire les informations qui s’y trouvent (ce qui est le cas quand elles portent un numéro ou qu’elles sont légendées classiquement « le père »…). En réalité, ce jeu a plus d’intérêt pédagogique quand on le fait fabriquer par les élèves que lorsqu’on le fait jouer ! Il est donc parfaitement emblématique de la pédagogie de projet.

Le JEU DE L’OIE est un des plus anciens jeux de plateau en Europe. Il en existe tellement d’applications que des ouvrages entiers leur sont consacrés. Il est d’ailleurs fort intéressant d’étudier comment les différentes époques ont généré leurs jeux de l’oie… Comme le jeu de 7 familles, ce type de jeu offre l’immense avantage d’être très facile à jouer et surtout très facile à faire fabriquer à des élèves. La contrepartie est l’absence de stratégie de jeu (tout est soumis au hasard du dé) et d’interaction entre les joueurs. Il est fort possible de le combiner avec un jeu de type Trivial Pursuit en y ajoutant des questions. On ne dira jamais assez tout l’intérêt qu’il y a à faire poser des questions aux élèves.

Ceux qui ont des jeunes enfants et qui fréquentent les ludothèques connaissent les grandes boîtes jaunes éditées par Haba. Cette marque allemande s’est fait une spécialité des jeux de qualité pour les petits (tant pour le matériel que pour l’intelligence des règles), en développant en particulier les jeux de coopération : soit on gagne tous ensemble en s’entraidant, soit on perd tous ensemble. La notion de victoire individuelle n’a plus aucun sens. Dans LA RONDE DU FERMIER, les joueurs doivent nourrir tous les animaux de la ferme avant que la nuit tombe, en déplaçant avec sa brouette de la nourriture adéquate à l’animal (on ne donne pas du foin au chien), en lançant un dé. Mais si le joueur s’aperçoit que le résultat du dé ne permet pas de faire un déplacement intéressant pour la ferme, il peut le donner à un autre joueur plus à même de nourrir un animal. Or, pour des tout-petits, renoncer à déplacer sa brouette est un déchirement… Ce jeu est bien sûr bien trop simple pour nos chers ados, mais le mécanisme est parfaitement transposable (vous le retrouverez dans les fiches de jeu de « Benidorm » ou des « guerres médiques ») et pas seulement en éducation civique !

LES COLONS DE CATANE est d’abord un jeu familial, il est donc simple d’accès et court mais il est très riche. Vous devez développer votre colonie sur un espace de jeu qui change à chaque partie. Pour construire des villages, des routes ou des villes, il va falloir acquérir des matériaux variés… que vous n’avez pas forcément sous la main et qui vont donc faire l’objet de négociations avec les autres joueurs. Mais l’espace n’est pas très vaste et vous allez vite entrer en concurrence. Par rapport aux autres grands classiques, les principales originalités sont le plateau modulable et surtout les combinaisons de cartes (il faut plusieurs matériaux différents pour se développer). Le hasard joue un rôle important, mais tempéré par les négociations entre les concurrents. Ce jeu a connu de multiples extensions, dont une sur l’Egypte antique et sur Alexandre le Grand. C’est un des jeux les plus faciles à transposer pour une classe.

CLUEDO est le modèle des jeux de déduction. Par un système de questions-réponses, chaque joueur essaie de deviner avant les autres qui est le coupable (celui-ci ayant été tiré au sort en début de partie). Le plateau sert à déplacer son personnage : le joueur ne peut poser que certaines questions en fonction de l’endroit où il se trouve. Ce jeu a été décliné sous de nombreuses variantes. Il est facile à transposer à n’importe quel thème.

N’hésitez donc pas à replonger dans ces grands classiques, ou appelés à le devenir : vous y trouverez tous les ingrédients de base pour réaliser votre jeu et des choix différents face aux dilemmes du créateur ludique (qui joue ? quand ? quelle place pour le hasard ? quelle surface de jeu ? quel matériel ? etc.).

Je sais créer mon jeu en 10 leçons

Créer un jeu est un processus assez long, souvent complexe, avec beaucoup d’hésitations, de tâtonnements, d’essais et d’échecs, somme toute assez mystérieux, comme toute création intellectuelle.

Vouloir modéliser les étapes d’une création de jeu est donc illusoire et présomptueux. Derrière le titre de cette rubrique, il faut donc plutôt voir une série de conseils classés dans un ordre a priori logique (mais l’expérience a montré que l’on peut commencer par n’importe quelle étape).

Pour rendre ces conseils plus concrets, ils sont accompagnés d’un exemple détaillant comment le jeu « Cuba 1962 » a été élaboré lors du stage de niveau 2 en 2003 (la fiche du jeu et son matériel sont disponibles dans la rubrique « Nos jeux »).

LEÇON 1 : déterminer l’objectif et le thème

Commencer par bien savoir ce qu’on veut faire passer est fondamental. C’est la première garantie contre la tentation de faire un jeu « totalitaire » (qui veut tout simuler avec des règles de 50 pages). Il est vivement conseillé de rédiger son objectif… comme pour une situation d’apprentissage ordinaire ! Vise-t-on plutôt des connaissances, la compréhension d’un mécanisme ou d’un système, une méthode, une attitude … ?

Exemple de la création de « Cuba 1962 »

Nous avons choisi cette crise car elle est un moment paroxystique de la guerre froide. Choisir une seule crise permettait aussi de limiter les facteurs à simuler, donc de rendre le jeu plus fluide. L’objectif était de faire comprendre l’escalade de surenchères des deux camps, au risque de déclencher une 3e guerre mondiale, mais aussi de montrer que les choix des deux camps ont été les résultats des compromis internes aux équipes dirigeantes.

LEÇON 2 : jeu d’émulation ou de simulation ?

Créer un jeu d’émulation est beaucoup plus simple, mais l’apprentissage portera avant sur des connaissances factuelles. Créer un jeu de simulation est plus complexe, mais l’ambition est de faire comprendre les mécanismes des acteurs géographiques ou historiques. Autre choix : prend-on le « risque » d’une simulation convergente (faire recréer la réalité) ou divergente (proposer des situations alternatives, éventuellement qui n’ont jamais eu lieu) ? Cruels dilemmes…

Exemple de la création de « Cuba 1962 »

D’emblée, le jeu de simulation a été retenu. Un jeu d’émulation sur un thème aussi précis n’apporterait pas grand chose aux élèves, sinon de l’érudition. Et puis, l’enthousiasme du groupe aidant, la motivation était grande de s’attaquer à la création d’un jeu de simulation en 2 jours ! Nous avons voulu aussi tenter la simulation divergente : comme le risque de déclencher un conflit nucléaire était grand, les élèves doivent l’assumer et pouvoir prendre la décision d’atomiser leur adversaire (virtuellement… c’est l’avantage de la simulation).

LEÇON 3 : penser l’intégration dans la séquence

A quel moment ce jeu va-t-il se placer ? En début de séquence, en cours, à la fin ? Comment formaliser les acquis des élèves après le jeu ? Quelle est la relation du jeu et de l’évaluation dans la séquence : le jeu est l’évaluation ? un entraînement à l’évaluation ? Le jeu est déconnecté de l’évaluation ? Combien de temps consacrer à ce jeu ?

Exemple de la création de « Cuba 1962 »

Compte tenu du thème, ce jeu est prévu pour être intégré en milieu de séquence (dans l’étude de la guerre froide en 3e) Il doit durer moins d’une heure, exploitation comprise (les élèves doivent comparer le résultat de la gestion de leur crise et la réalité du dénouement). Les élèves auront donc la situation de départ de la crise de Cuba (au moment de la découverte des missiles par les Etats-Unis) et agiront librement ensuite.

LEÇON 4 : les paramètres à jouer

Etape cruciale : il faut circonscrire avec précision ce que les élèves vont manipuler dans le jeu. Pour le jeu d’émulation, il suffit de dresser une liste des savoirs que l’on veut que les élèves s’approprient. Pour le jeu de simulation, la tâche est plus ardue : il faut d’abord lister les paramètres de la simulation et construire un organigramme qui les mette en relation. Attention : les créateurs ont tendance à toujours être gourmands. Un trop grand nombre de paramètres à gérer conduira à un jeu réaliste mais peu jouable… Nous avons tous succombé à ce défaut de débutant (pour lequel nous avons cependant une grande indulgence).

Exemple de la création de « Cuba 1962 »

Une première liste a été dressée :

– la composition des équipes dirigeantes des Etats-Unis et de l’URSS + Cuba lors de la crise des fusées

– l’espace du conflit (Etats-Unis – Cuba, voire URSS)

– les options des deux camps (ne rien faire, se menacer, déclencher une guerre, assassiner Castro, négocier…)

– le matériel des deux camps (armes conventionnelles, armes nucléaires, moyens de transports…)

– le rôle des autres acteurs comme l’ONU, les alliés deux camps.

… ce qui faisait beaucoup de choses ! D’où une perplexité certaine devant le défi de transformer tout ça en jeu.

Le cœur de la simulation a donc été réduit à ce « système » : les équipes des 2 camps adverses sont hétérogènes (chaque membre n’a pas forcément le même but, comme on le sait bien au sein de l’équipe Kennedy) ET elles doivent négocier en interne pour déterminer une action (la guerre, céder, en appeler à l’ONU…) PUIS les deux équipes adverses (EU/URSS) doivent comparer leurs choix pour déterminer ce qu’elles feront ensuite et retour à une négociation interne etc.

On a donc un système « en boucle », pouvant prendre l’allure d’un « cercle vertueux » (on négocie et on finit par trouver une solution satisfaisante à la crise) ou un « cercle vicieux » (escalade de surenchères menant à une solution de force). Ceci a permis de faire une sélection dans la liste des paramètres en excluant la gestion de l’espace du conflit et la matériel des deux camps. En revanche, on gardait la composition des équipes dirigeantes (en mettant l’accent sur les divergences internes, comme entre les « faucons » et les « colombes ») et la liste de toutes les options possibles. Un problème demeure : comment simuler simplement la surenchère entre les deux camps ? Suspense…

LEÇON 5 : se documenter … ludiquement

En cherchant bien, il y a toujours un jeu existant qui a traité du même thème ou qui offre un mécanisme transposable. C’est à ce moment que l’on découvre les enseignants qui ont acquis une grande culture ludique (au lieu de corriger leurs copies ou de relire le dernier livre de leur ministre préféré qui explique que le jeu n’a pas sa place en classe). Et dire que personne ne nous croît lorsque nous affirmons que nous travaillons quand nous jouons… Quelle misère ! Pour découvrir des exemples de jeux existants sur le thème qui vous titille, l’exploration du web est une mine, sans oublier de traduire votre recherche en anglais, les Anglo-Saxons étant beaucoup plus imaginatifs que nous (jeu de plateau se dit boardgame).

Exemple de la création de « Cuba 1962 »

Point de jeu simple sur la guerre froide ou alors des wargames trop pointus pour être utilisables en classe. La proposition de départ était de concevoir un jeu de rôles ouvert : chaque élève aurait incarné un acteur précis de la crise (J. ou R. Kennedy, Castro, Mc Namara…), avec une fiche en main détaillant le personnage (fonction, objectif, arguments…) et aurait négocié librement, par la parole, avec les autres membres de son camp pour déterminer l’action de son camp. Avantage : aucune règle de jeu. Inconvénients : il fallait se documenter sur chaque personnage pour composer des dossiers complets (ce qui n’est guère possible encore aujourd’hui pour le camp soviétique) et surtout, les élèves pouvaient être déconcertés par cette grande liberté ou plus simplement « ne pas jouer le jeu » ou faire passer leurs propres opinions à la place de celles du personnage qu’ils devaient incarner (problème très fréquent en jeu de rôles avec des jeunes). Rapidement, les créateurs du jeu ont donc éliminé cette piste ludique et se sont orientés vers la rédaction de « cartes » de jeu de deux types : celles qui représentaient les personnages réels et celles qui simulaient les actions possibles pour les deux camps (guerre, négociation, protestation officielle, plainte à l’ONU…).

LEÇON 6 : la règle d’un jeu d’émulation

Nous voici au cœur de la création : quels sont les mécanismes précis du jeu ? Pour le jeu d’émulation (et surtout pour les jeux de questions-réponses), les points de règles sont assez faciles à définir :

– l’objectif du jeu : redonner une réponse supposée être connue (de mémoire) ? trouver une réponse en se documentant ? produire une information (phrase, dessin, carte…) ? classer des informations ? parcourir un chemin semé d’obstacles ?

– qui prépare les questions ? (l’enseignant, un groupe d’élèves, tous les élèves individuellement ou par équipes…)

– qui joue ? (tous les élèves individuellement ou par équipes, un élève ou une équipe à chaque séance…)

– qui arbitre ? (l’enseignant, un élève, un jury d’élèves…).

– quel est le tour de jeu ? (chacun son tour, système de défi entre équipes, tirage au sort, l’équipe qui perd joue en premier…)

– comment gagner ? (en donnant la bonne réponse, en donnant le premier la bonne réponse – ce qui est assez difficile à gérer car on a rarement des buzzers en classe-, en remplissant une série de critères…).

– comment compter les points ? (1 point par bonne réponse, nombre variable de points selon la difficulté de la question, – 1 point par mauvaise réponse, possibilité de faire un « banco » c’est à dire miser tous ses points sur une question etc.). Penser aussi à déterminer où les points vont être comptabilisés (feuille, tableau, rétro…).

– qu’est-ce qu’on gagne ? (se faire applaudir, un trophée remis en jeu, un diplôme, une place dans un classement sur l’année à partir d’épreuves de jeux…). La « clôture symbolique » est importante !

Exemple de la création de « Cuba 1962 »

« Cuba 1962 » n’étant pas un jeu d’émulation, vous pouvez passer à la leçon suivante pour suivre le passionnant feuilleton de la création de ce jeu, où vous aurez la réponse à une question angoissante : y arriveront-ils ?

LEÇON 7 : la règle d’un jeu de simulation

Il faut garder à l’esprit un impératif : avoir une règle la plus simple possible… mais aussi la plus inattaquable. Pour résumer, elle doit ressembler à un diamant : petite, résistante et brillante. Il convient donc de résoudre les problèmes suivants :

– quel est le tour de jeu ? (les joueurs jouent les uns après les autres, ou en même temps, ou tous la première action en même temps puis tous la deuxième action en même temps…). Quel minutage ? (rien de pire qu’une équipe qui traîne à agir…).

– quelles sont les actions possibles de chaque joueur ? Comment sont-elles matérialisées dans le jeu ? Comment sont-elles résolues ?

– quelle est la répartition des élèves ? (un élève = un joueur, ou par équipes, ou tous les élèves forment une seule équipe…). Certains élèves participent-ils à l’arbitrage ou à la menée du jeu ? Peuvent-ils se déplacer ?

– quelles sont les interactions entre les joueurs ? Compétition, coopération, négociation… ou neutralité (chacun joue dans son coin).

– quel est le rôle de l’enseignant ? Arbitre, joueur à part entière, observateur, metteur en scène…

Exemple de la création de « Cuba 1962 »

Les auteurs ont fait les choix suivants :

– la classe est divisée en deux équipes (camp communiste / camp des Etats-Unis). Chaque élève reçoit une carte personnage différente.

– l’enseignant est à la fois le meneur et l’ONU.

– tour de jeu alterné : une équipe a un temps limité pour négocier en son sein et dévoiler son action. Puis l’autre fait de même pour réagir et ainsi de suite.

– les interactions entre les deux équipes sont la réaction (à l’action adverse) et la négociation (quand elle est explicitement demandée) sous l’égide de l’ONU.

LEÇON 8 : les ingrédients du jeu

Les ingrédients de tous les jeux sont les mêmes, mais leurs combinaisons sont infinies :

– la parole évidemment, pour annoncer son action, pour négocier, pour répondre à une question… Il n’est pas inutile de définir ce que chaque joueur doit ou peut dire dans le jeu.

– le papier / crayon : feuille libre, tableau à remplir, liste à cocher, documents ressources, feuille de personnage…

– les dés, pour faire intervenir le hasard. Sachez qu’il existe des grands dés en mousse (idéal pour jeter au sol sans risque), des dés à 4, 8, 10, 20 faces (dans les boutiques spécialisées de jeux), des dés vierges (souvent dans les catalogues de fournitures éducatives ou de travaux manuels). Pensez aussi aux jetons (type loto) qui peuvent concrétiser les facteurs aléatoires.

– les cartes, à tirer au hasard, à capitaliser, à négocier et échanger, d’aide-mémoire, d’action (chaque carte représente une action possible), à poser (sur un plateau de jeu ou sur une table)…

– le plateau, qui peut être abstrait (type Monopoly) ou réaliste (type Diplomacy), entièrement connu dès le début du jeu ou à construire au fur et à mesure, individuel (pour chaque joueur) ou collectif (pour chaque équipe ou pour la classe), intangible ou modifiable par le jeu… pour représenter un espace à parcourir, découvrir, aménager, gérer, contrôler…

– les pions, plus ou moins symboliques, pour montrer une capitalisation (des points par exemple), une occupation d’un espace, une valeur d’échange, une action… Ces pions peuvent être tous identiques ou être différenciés.

Aucun de ces ingrédients n’est obligatoire ! Ainsi le Mille Bornes se passe de plateau, Diplomacy se passe de dés, le jeu de l’oie se passe de cartes… Il ne faut conserver que le matériel strictement indispensable au jeu, d’autant que sa fabrication est souvent fastidieuse voire coûteuse.

Exemple de la création de « Cuba 1962 »

Le choix s’orientait donc de plus en plus vers un jeu de cartes de type Mille Bornes : tout le matériel de jeu est dans les cartes. Ces cartes sont de deux types :

– les cartes personnages avec le nom, la fonction, la photo si possible et l’objectif personnel (exemple : résoudre la crise en restant au plus bas niveau de tension avec l’ennemi).

– les cartes d’actions, classées en 5 niveaux de gravité (1 : protestations, 2 : menaces, 3 : mise en alerte militaire, 4 : actions militaires ponctuelles et conventionnelles, 5 : guerre nucléaire), plus une carte « demande de négociation » et une carte « céder à l’ennemi ». Ainsi, le blocus de Cuba est une carte de niveau 3 dans le jeu des Etats-Unis. Les cartes 1 sont plus nombreuses que les cartes 2, elles-mêmes plus nombreuses que les cartes 3 etc. Il existe bien sûr qu’une seule carte 5. Au fur et à mesure, les deux camps ont donc de moins en moins d’actions possibles.

– il est donné à chaque équipe une liste de ce qu’elle peut négocier avec l’adversaire (exemple : l’URSS peut céder Berlin-Est aux Etats-Unis en échange du maintien des fusées à Cuba).

La mécanique de jeu est simple : quand un camp décide quelle action il joue, il ne peut poser qu’une carte de valeur égale ou supérieure à celle qui a été posée par le camp adverse avant. Ceci permet de simuler l’escalade.

Cette escalade peut être interrompue à tout moment dès qu’un camp demande une négociation (deux émissaires de chaque équipe se rencontrent pour voir à partir de leur liste ce qu’ils peuvent « échanger »), ou si les cartes 0 ou 5 (fin du jeu). Si la négociation échoue, l’escalade reprend.

Tout le matériel envisagé au début de la conception a été abandonné (cartes de Cuba, liste de matériel….) car il n’avait pas d’utilité ludique.

LEÇON 9 : anticiper la menée

Pour un jeu d’émulation ou de simulation, il faut penser aux points suivants pour la menée du jeu :

– quel matériel prévoir et apporter ?

– comment « amener » le jeu dans la séquence pour le présenter aux élèves comme un prolongement normal ?

– comment organiser la classe de façon optimale ?

– comment expliquer rapidement les règles ?

– comment répartir les élèves en équipes ? (choix libre des élèves, méthode alphabétique, aléatoire, choix par des « capitaines », couper la classe en x parties…)

– si le jeu doit s’étaler sur plusieurs séances, comment faire le lien entre des séances disjointes ?

– quel retour au calme en fin de jeu ?

– quelle exploitation pédagogique ?

Pour un jeu d’émulation, le principe de base est de canaliser les énergies des élèves. Le moindre détail a donc son importance :

– comment présenter les questions ? Truc : présenter les questions à l’écrit (feuille, rétro…) oblige les élèves à se concentrer dans le silence pour les lire. C’est appréciable parfois… Autre question liée : qui présente les questions ? (ce n’est pas forcément l’enseignant)

– comment les élèves répondent-ils ? Un truc : préparer des panneaux (vierges ou avec des solutions A, B, C etc.) que les élèves ont à lever au top de l’arbitre est une de meilleures solutions pratiquées.

Exemple de la création de « Cuba 1962 »

Lors du premier test en 3e, la classe a été coupée en deux, placées aux coins opposés de la salle. L’enseignant s’est placé au milieu. En amorce, le début du film « 13 jours » (R. Donaldson, 2001) a été passé aux élèves (découverte des fusées soviétiques par l’équipe de Kennedy). L’enseignant re-précise le contexte rapidement.

Puis il distribue les cartes de personnages en rappelant :

– le but de chaque camp.

– que chaque personnage a aussi un objectif individuel.

Puis, il donne à chaque camp le paquet de cartes d’action en demandant aux deux équipes de bien les étaler. Le camp des Etats-Unis a l’initiative de poser la première carte (l’enseignant rappelle la règle de pose). En fin de jeu, on compare le résultat obtenu par la classe en passant l’extrait d’un documentaire historique court sur le déroulement et l’issue de la crise de Cuba.

LEÇON 10 : tester et re-tester

Pas de secret : plus vous testerez un jeu, plus il sera viable. Il est arrivé à chacun d’entre nous de découvrir qu’un jeu qu’on croyait parfait sur le papier ne fonctionnait pas aussi bien en classe. Testez-le avec vos collègues, dans les stages, avec vos enfants et votre famille (pour voir si le jeu est simple et intéressant), avec de petits groupes d’élèves (un jour de grève par exemple…). C’est d’ailleurs en le testant que vous vous apercevrez tout de suite des améliorations à apporter et de l’évolution possible de votre jeu.

Exemple de la création de « Cuba 1962 »

L’idée de la règle de la pose des cartes d’un niveau égal ou supérieur à la précédente n’est venue à l’esprit des concepteurs du jeu qu’après plusieurs parties où ça ne « fonctionnait » pas. Après tout, les historiens ont souvent dit que cette crise avait été une partie de poker… Chiche ! Le test en classe a confirmé que le jeu était rapide (20 minutes, surtout quand l’équipe des Etats-Unis a la bonne idée de déclencher un conflit atomique foudroyant : les « faucons » avaient été très persuasifs et Kennedy très influençable). Quand un joueur des Etats-Unis s’est levé en disant « on a gagné ! », l’enseignant lui a passé un autre extrait sur les dégâts des armes atomiques, expliquant du même coup pourquoi elles n’avaient pas été utilisées pendant la guerre froide, concept que l’élève n’avait visiblement pas compris…

La boîte à outils du créateur

La première boîte à outils est matérielle : des ciseaux, de la colle, du papier de tous formats et de toutes les couleurs…

Quelques astuces :

– dans les vide-greniers vous pourrez acquérir des boites de jeux pour un prix symbolique, afin de récupérer leur matériel (pions, dés, cartes…)

– ne faites pas trop beau dès le départ : concentrez-vous sur la jouabilité, pas sur l’esthétisme

– pensez repro : un jeu en noir et blanc sera moins coûteux à dupliquer que celui qui va vous faire acheter les 3 cartouches couleurs de votre imprimante chaque semaine

– le carton de calendrier (celui où vous cochez les jours avant les vacances) est excellent pour faire des plateaux de jeux. Mais il est tout à fait possible de faire imprimer votre magnifique plateau de jeu … sur de la toile pour le rendre solide et facile à ranger (renseignez-vous dans les entreprises de repro, le prix est moins élevé qu’on le pense).

– le bristol blanc 200 gr / m² fait un excellent support pour les cartes… sauf qu’il glisse mal : vous pouvez investir dans des protège-cartes trouvables dans n’importe quel magasin de jeux spécialisé. Si vous passez à la vitesse supérieure, Artscow vous fabrique un jeu de cartes entièrement personnalisé.

– si vous voulez vraiment impressionner vos collègues, votre proviseur bien-aimé et votre IpR adoré, il existe des boutiques de matériel de jeux, comme Plastic for Games ou Spielmaterial ou ce site spécialiste des dés .

La seconde boîte à outils est sur le web, afin de trouver si votre projet a été plus ou moins traité par d’autres :

– Google étant votre ami, vous pouvez tenter une recherche directe… sans oublier de la doubler en anglais (notamment avec le terme boardgame : jeu de plateau)

– le site français le plus actif et le plus riche reste Tric Trac. Il s’est doté de vidéos explicatives sur les règles qui peuvent donner plein d’idées. N’hésitez pas à vous inscrire sur le forum, qui comporte une partie spécialisée « création », pour demander des idées de jeux sur un thème, des conseils sur un mécanisme ou des « playtesteurs » (qui vont tester le jeu pour vous)

– son homologue étatsunien est Boardgamegeek, qui permet de rechercher des jeux à partir d’un terme générique. Ses listes de sélection, sur le modèle des listes de lecture d’Amazon, permettent de découvrir des inédits. Et si vous tapez « free print and play », vous pourrez trouver de nombreux jeux gratuits à imprimer vous-même.

Les 10 commandements du meneur de jeu

Il n’est peut être pas inutile de rappeler quelques règles de bon sens pour mener un jeu en classe, activité pour laquelle les élèves sont demandeurs d’explications claires, rapides ainsi que d’arbitrage impartial et impitoyable. Mener un jeu est parfois plus difficile qu’un cours plus classique (et souvent plus fatigant !).

Toujours avant le jeu ma salle j’aménagerai.

La disposition de la salle est une étape cruciale dans la réussite du jeu. Quelques questions simples auxquelles il faut penser avant : tout le monde verra-t-il le plateau de jeu ? Qui aura le droit de se déplacer ? Dans quel ordre joueront les équipes ? Que mettre au tableau ? etc

En cas de nécessité, un assistant je prendrai.

Pour manipuler des pions, distribuer des billets … il est souvent utile de détourner un ou deux élèves chargés de vous assister. Évitez en revanche de les faire arbitrer. Prendre un assistant est parfois utile aussi pour éviter qu’un élève trop perturbateur gêne le jeu.

Clairement et progressivement mais rapidement les règles j’expliquerai.

C’est la clé pour donner aux élèves l’envie de jouer. la difficulté est d’être à la fois clair ET rapide. Évitez de donner des conseils stratégiques à ce moment-là. Si les règles sont complexes, prévoyez de les introduire petit à petit dans le jeu.

Un tour pour rien j’organiserai.

Le fameux « coup pour du beurre » est le moyen le plus utile de lancer le jeu pour vérifier que les élèves ont compris sans s’attarder sur les règles.

Au respect des règles impitoyablement je veillerai.

Le jeu perdra toute crédibilité si vous revenez sur un résultat, si vous acceptez une contestation, si vous transigez. Soyez fermes, sacrebleu !

Un silence absolu néanmoins point je n’imposerai.

Jouer peut faire du bruit. Il faut l’accepter. A vous de fixer la limite.

D’une clôture symbolique le jeu je terminerai.

Il faut à la fin du jeu clairement désigner le ou les vainqueurs, si oui ou non la classe a atteint ses objectifs : c’est la « clôture symbolique », indispensable surtout avec des jeux d’émulation. Le jeu est fini : on l’annonce clairement. On peut alors passer à l’exploitation pédagogique.

Jamais au grand jamais, l’exploitation pédagogique je n’omettrai.

On ne joue pas pour jouer, mais parce que c’est une meilleure situation d’apprentissage à un moment donné avec un groupe donné. Évitez en revanche de mener l’exploitation pédagogique pendant le jeu : échec assuré (les élèves pensent à tout autre chose) et vous risquez de casser la dynamique du jeu.

Toujours avant l’arrivée du prof suivant, la classe je ferai ranger.

Par expérience, la récupération du matériel de jeu (en particulier les petits pions, les petites cartes, les petits jetons …) est un tâche assez fastidieuse. Prévoyez un temps de rangement (qui peut se situer entre le jeu et l’exploitation pédagogique pour faire souffler les élèves).

Dans la salle des profs ouah, je viens de passer une heure fabuleuse où les gosses ont bien bossé ! jamais je ne hurlerai.

Enfin c’est vous qui voyez mais c’est risqué …

268 thoughts on “Faites vos jeux

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