La troisième vie de « J’ai vécu la Révolution et l’empire »

J’ai vécu la Révolution et l’empire est l’un des jeux les plus anciens et les plus réussis du réseau Ludus. Créé par Yvan Hochet (inspiré par le cultissime J’ai vécu au XVIIIème siècle de Dominique Natanson) il a ensuite été adapté à de nombreuses reprises et notamment par notre ami et néanmoins breton Sébastien Peigné qui en a réalisé une version blog. Il nous en propose aujourd’hui une nouvelle évolution adossée à une série de Google forms créés pour l’occasion. C’est LA bonne idée pour améliorer encore la jouabilité de ce très bon jeu de rôles.

Cet exemple montre la vitalité du jeu pédagogique et valide, s’il en était encore besoin, le choix de la mutualisation et de l’enrichissement collectif que nous avons opéré dès le début de l’existence du réseau Ludus il y a maintenant près de 20 ans.

Il illustre en outre au passage l’intérêt de la rencontre entre le jeu traditionnel papier-crayon et les outils numérique. Et ce n’est qu’un début ! Nombre de jeux physiques peuvent être enrichis et rendus plus riches et plus interactifs à l’aide des outils numériques sans pour autant devenir des jeux vidéos intégraux. c’est l’une des pistes qu’il nous faudra continuer à creuser.

Denis Sestier

La présentation de la nouvelle version de J’ai vécu la Révolution par Sébastien Peigné

Origine du jeu

Pendant plusieurs années, l’académie de Caen a mis en place des stages sur l’utilisation du jeu en cours d’histoire-géographie et éducation civique, au sein du réseau Ludus. Parmi les productions ludo-pédagogiques figure le jeu « J’ai vécu la révolution », créé par Yvan Hochet. Les élèves construisent un personnage en 1789 et traversent la révolution en le faisant réagir aux événements qui parsèment les 25 années suivantes.

Cette démarche originale et stimulante n’en répond pas moins aux exigences des programmes de 4ème en histoire. Elle permet en plus d’être en prise directe avec la recherche historique telle qu’elle se pratique  en plaçant l’événement, l’individu et sa sensibilité au centre d’une meilleure compréhension de la période révolutionnaire.

Le jeu repose sur 5 attitudes qui représentent les opinions des protagonistes de la Révolution et de l’Empire :

  • les Conservateurs (Chouans, contre-révolutionnaires) qui représentent le parti de la Reine, du Comte d’Artois et des immigrés.
  • les Modérés : en 1789, on peut les assimiler au parti de Lafayette, favorable aux réformes et à une monarchie parlementaire ; puis au cours de la Terreur, ils vont se retrouver plus proche des Conservateurs ; l’arrivée de Napoléon est souvent vécu par eux comme une aubaine et ils regroupent alors l’ancienne noblesse libérale et la nouvelle élite impériale.
  • les Républicains (tendance girondine) : leur idéal, c’est la DDHC ! Leur modèle, c’est l’Amérique ! Un temps tenté par Napoléon, mais déçus par ses déviances autoritaires, ils défendent les libertés et une République modérée.
  • les Enragés : un seul maître, Robespierre ! Une seul maîtresse, la guillotine ! Ils enragent de tout ce qui peut ressembler à un privilégié, noble ou clerc. Ils veulent une République des égaux.
  • les Prudents sont sûrement les plus silencieux, mais aussi les plus nombreux. Cette opinion repose sur l’idée que la majorité des Français a plus subi qu’autre chose la Révolution et ses débats qui les dépassaient.

Comme tout jeu, ces opinions peuvent paraître un brin caricaturales. Elles sont tout de même corroborées par les positions de Jean-Clément Martin qui considère que la Révolution est un théâtre où s’affronte, s’allient et se délient les protagonistes partageant les quatre premières opinions, suivant les périodes.  Sur ce sujet, on pourra notamment consulter l’excellent numéro de la documentation photographique que Jean-Clément Martin a consacré à la Révolution en 2006.

Comment j’utilise le jeu en classe

Pendant longtemps, j’utilisais la version papier du jeu que les élèves complétaient par la rédaction d’articles sur un blog (version 2011 … l’ultime en raison des changements de programmes).

Après quelques années de mise en sommeil, j’ai décidé de réutiliser le jeu qui marchait si bien et de le mettre sous forme de QCM auto-corrigés, réalisés avec Google Forms. Chaque questionnaire correspond à une opinion ; à chaque question, l’élève doit choisir la réponse qui correspond à l’opinion du questionnaire.

un exemple de questionnaire pour les Enragés (1789-1791) : vous pouvez le tester et l’utiliser avec vos élèves ; c’est une copie

 

Le jeu permet d’évaluer leur compréhension des événements et des opinions qui parcourent la Révolution. Selon le niveau de lecture, un questionnaire dure entre 15 et 30 minutes. Les élèves les plus rapides peuvent le refaire en prenant une autre opinion. Soit ils choisissent leur opinion parmi les 5 que je distribue pour chaque période (elles évoluent au fil du temps). Soit je l’impose, selon le niveau de lecture et de compréhension de l’implicite et des événements.

l’ensemble des questionnaires (vous pouvez les utiliser avec vos élèves ; ce sont des copies)
SERIOUS GAME – J’ai vécu la Révolution, par speigne 

Analyse

Le jeu induit une certaine différenciation :

  • Il est difficile pour des élèves en grande difficulté de lecture (ici, en éducation prioritaire). Ils décrochent au bout de quelques questions. Je leur réserve l’opinion Prudent.
  • Les opinions extrémistes Conservateurs et Enragés sont bien réussies (ce qui est assez terrifiant …).
  • Par contre, les opinions Modérées (républicaines et monarchistes) posent plus de difficultés. Je la donne aux élèves les plus nuancés dans leur analyse …

Les élèves apprécient (et le correcteur aussi) l’immediate feedback. Certains élèves, rares quand même, effectuent tous les questionnaires à la maison.

Je pense que cette activité peut être un bon atelier que l’élève vient faire individuellement en autonomie sur une tablette ou un ordinateur.

Sébastien Peigné. Académie de Rennes

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