Questions de définition, de légitimité et d’efficacité

Les parutions récentes autour des jeux en classe tournent autour de trois questions.

La question de la définition. Dans son billet sur une expérience de jeu dans une école du Québec (« Ludification ou jouons ensemble pour apprendre !« ), Ninon Louise Lepage rappelle que le serious game n’est qu’un aspect (étroit) de toute la gamification (ou ludification) possible à l’école. Moralité : créer un jeu pédagogique, c’est faire de la gamification. C’est sans doute un peu réducteur, d’autant que le principal avantage décrit se situe au niveau de la motivation, mais le billet a le mérite d’être clair et engageant. L’article de Thot Cursus sur « Dix jeux de société pour se perfectionner dans sa propre langue » montre que la frontière est ténue entre jeu du commerce et jeu pédagogique, qu’il ne suffit d’un « presque rien » pour transformer un produit ludique en outil efficace.

La question de la légitimité. Le récent jeu « Soldats inconnus » sur la Première Guerre mondiale a fait l’objet d’un bel argumentaire pour le promouvoir : il semblerait que l’on ait là l’exemple d’un exemple particulièrement réussi d’équilibre jouabilité – réalisme, sans que le jeu ne soit pour autant un jeu de guerre classique (pas testé). En revanche, « Questions de recherche autour des serious games » de Michel Lavigne adopte une posture plus critique envers les serious games, s’appuyant sur une explication du contexte économique de production et une enquête de perception auprès d’étudiants (eux-mêmes plus ou moins joueurs). Si le billet me semble souffrir d’un pré-supposé, il n’en reste pas moins très intéressant à lire (y compris dans les commentaires) pour prendre un peu de recul. Face à la polémique « Assassin Creed » sur la Révolution française, le site Thot Cursus pose la question « Peut-on enseigner l’histoire avec le jeu vidéo ? » : la réponse est fort intelligemment nuancée et encore une fois, la confusion vient de la pensée magique que le jeu va modeler à lui seul l’imaginaire des joueurs. Heureusement, il y a des journalistes pour rappeler aux politiques qu’il existe des enseignants… Si le sujet vous intéresse, prenez un peu de temps pour voir, lire et écouter ce documentaire de France Culture sur ce jeu polémique et son rapport à l’Histoire. L’INRIA se pose moins la question et adopte le ludique pour faire découvrir les rudiments de l’informatique aux plus jeunes, la Belgique utilise le jeu des portraits pour sensibiliser aux comportements sur le web, deux doctorants conçoivent un jeu pour simuler l’évolution du climat au lycée. Les initiatives qui semblent s’accélérer ces derniers mois répondent à la question de la légitimité par l’action.

La question de l’efficacité. L’article de Thot Cursus « Alors, les serious games en classe ? Ça fonctionne ? » semble limiter la question aux jeux sérieux en ligne, mais les références citées (dont de très sérieuses études citées déjà par André Tricot) concernent l’ensemble des jeux pédagogiques. On ne pourra que souscrire à la conclusion du billet : « L’approche par le jeu n’est donc pas une panacée éducative, mais il a visiblement tout à fait sa place dans le coffre à outils de tout enseignant. »  De même, le court compte-rendu du même site sur « Le jeu pour apprendre les valeurs d’entreprendre » résume la conclusion principale d’une thèse sur l’usage d’un jeu de simulation (non numérique) de gestion d’entreprise en école d’ingénieurs : le jeu semble être une méthode pédagogique efficace pour ancrer plus durablement la valeur de « progrès permanent ».

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