La découverte sensationnelle d’une nouvelle espèce…

S’il n’est plus si exceptionnel de trouver les restes fossilisés de nouvelles espèces humaines (c’est le cas par exemple de l’Homme de Flores, de l’Homme de Denisova), il est par contre extraordinaire de découvrir une nouvelle espèce… Quelle annonce en effet, nous qui pensions être les seuls êtres humains de la Terre, voici donc que nous nous sommes trouvés un contemporain. Je n’en reviens toujours pas ! Et dire qu’il était là, juste sous nos yeux ! Comme pour toute découverte, il fallait bien lui trouver un nom. Bien sûr, j’ai tout de suite pensé à lui associé mon nom en tant que découvreur pour passer à la postérité moi aussi… Mais cela faisait un peu trop prétentieux (et puis pour la postérité, j’ai mes chroniques) alors j’ai fait plus simple : Homo evaluator. Ça sonne pas mal vous ne trouvez pas ?

évaluation

Un nom c’est bien, mais ça ne suffit pas : je me suis aussitôt mis au travail pour décrire cette nouvelle espèce. Pourquoi était-elle passée inaperçue pendant aussi longtemps ? Et bien tout simplement parce que cette espèce est très proche de l’Homo sapiens, si proche en fait qu’il faut être très attentif pour les discerner. Je pense donc que l’ancêtre commun de H. sapiens et H. evaluator est très récent dans l’histoire évolutive de ces espèces… peut-être même existe-t-il toujours ?

Je me suis donc mis en quête des innovations évolutives d’H. evaluator : le travail de description en est encore à ses balbutiements mais voici quelques éléments caractéristiques :

Ils sont essentiellement culturels en fait !

Tout d’abord, s’il possède la même technologie que son cousin H. Sapiens, Homo evaluator semble prêter beaucoup d’intérêt à un outil qu’il parait investir d’un pouvoir mythique, une sorte de gri-gri en forme de bâtonnet à la couleur vive : son « stylo rouge », dont il ne semble jamais se départir (il est fréquent d’ailleurs d’en trouver plusieurs sur lui, dissimulés dans ses poches, trousses, cartables…).

J’avais, de prime abord, émis l’hypothèse qu’il pouvait s’agir d’un élément de parade nuptiale, la couleur générant un attrait sexuel pour les femelles, mais il faut bien se rendre à l’évidence : cet élément semble présent également chez les deux sexes … Pour l’instant je penche pour un élément de pratique artistique : à l’instar des peintures rupestres des Hommes de Cro-Magnon, H. evaluator semble passer beaucoup de temps à orner des piles de copies préalablement et scrupuleusement collectés chez un groupe de jeunes Homo sapiens qu’il appelle « ses élèves ».

Cette pratique culturelle semble être très importante pour lui car : tout d’abord, il aime à se submerger lui-même de copies en récupérant un maximum de devoirs, résumés, brouillons, cahiers, diaporama et tout ce qu’il peut évaluer.

De plus lorsqu’il a rendu un paquet il en reconstitue aussi un dans la foulée. Enfin, il y consacre énormément de temps : le soir venu ou encore le weekend, il paraît prendre un plaisir non dissimulé à s’isoler avec son paquet de copies, dans ce qui est comparable à une tanière ou bien la pénombre des grottes de son ancêtre Cro-Magnon : ce qu’il appelle son « bureau », comme pour mieux savourer son ouvrage.

Un point me rend cependant plus particulièrement perplexe : il semble passer le plus de temps à décorer les copies contre lesquelles, paradoxalement, il peste le plus.

Bon, je dois bien l’avouer, je n’ai pas trouvé d’H. evaluator, mais s’il n’y a pas d’évolution il s’agit bien d’un problème d’évaluation…

En effet, quelquefois après trois jours sur quatre consacrés lors d’un weekend prolongé d’Ascension à corriger des copies de bac blanc et lire des fiches de synthèse de TPE, puis 14 heures en évaluation orale de cette même épreuve, je m’interroge….

Sommes-nous atteints d’une mutation qui nous pousse à évaluer, évaluer et encore évaluer ? Pire encore suis-je tout simplement devenu une machine à évaluer ? Cette évolution est-elle irréversible ? Est-ce une fatalité du métier ?

Ainsi va la vie d’évaluateur me direz-vous, mais : et vous ? Arrivez-vous à évaluer la place que tient l’évaluation dans votre quotidien d’évaluateur ?

Damien THOMAS
(qui n’évalue encore pas bien les retombées de cette chronique)

2 réponses

  1. J’ai adoré cette chronique qui m’a bien fait(e) rire!!!
    Effectivement, on corrige pas mal surtout à certaines périodes de l’année, notamment au moment des éval trimestrielles. J’appelle ça le « marathon des corrections » .On enchaîne, on enchaîne, on enchaîne…..on devient les terminators du stylo rouge!!!
    Et puis les notes que l’on peut mettre parfois à nos élèves!!!!
    17,3- 12,8- 08,4….Juste dans un souci d’équité, on fait appel à la sacro-sainte règle de trois…..n’importe quoi!!!!
    En tous les cas, j’ai effectivement un stylo rouge dans mon sac à main…..mais c’est juste au cas où, hein!!!! Ne vous inquiétez pas, je me soigne!!!!
    Dis docteur, est ce que ça compte si je prends un stylo rose !?!?!?!

    1. merci pour le commentaire!
      Le « marathon des corrections », l’image est intéressante : c’est long et on en sort vidé…
      Un stylo rose? Avec des paillettes? En tous cas, c’est un signe de début de guérison, mais il faudra jeter le stylo rouge caché dans le sac à main!

Laisser un commentaire

buy windows 11 pro test ediyorum