Alors que mes élèves rentrent calmement dans la classe et s’installent sans dispute ni haussement de voix excessifs, j’installe sereinement les quelques derniers outils de travail nécessaires à une journée totalement active et productive de travail. Chaque élève, fraîchement reposé par un coucher raisonnable la veille au soir, prend le temps de me dire un scintillant « bonjour !» avec une spontanéité qui ne met absolument pas en doute les règles de politesse qu’ils reçoivent à la maison.

reve-primaire

Je souris et c’est avec grande joie que je leur retourne ce joli salut, …

…tout en les remerciant d’avoir naturellement essuyé leurs pieds et d’avoir spontanément ramassé le manteau du camarade s’écroulant sous leurs yeux dans le couloir… Quant à l’élève qui tient la porte d’entrée pour accueillir agréablement ses camarades, je l’invite à rejoindre sa place et le félicite au passage d’avoir ramassé au passage ce papier « abandonné » juste à ses pieds.

Je souris : il baigne encore ce matin un climat de bonne humeur et de paix.

Les élèves assez rapides ont déjà déballé et rangé dans un alignement parfait leur cartable en fond de classe et se trouvent assis à leur place. Certains m’interpellent en levant leur doigt sans mot dire. C’est pour me demander : « Madame, puis-je vous aider ? Puis-je aider un camarade ou vous rendre un quelconque service ? ».

Je souris : comme chaque matin, leur esprit est déjà connecté aux règles de la collectivité : respect, entraide, solidarité.

Les pochettes contenant les messages courtois, lisibles et respectueux rédigés par les parents (toujours dans le cahier de liaison) sont déposées sans la moindre réclamation de ma part dans le panier prévu à cet effet. Chacun sait qu’il attendra que je puisse trouver le temps de lire et de répondre aux multiples demandes sans réclamer avec insistance la consultation de leur message en avant-première.

Suivent alors les rituels de la classe :

Je souris : le droit d’expression, l’écoute de l’autre, le partage de son expérience… ils deviennent de bons petits Charlitoyens 😉 !!

Les activités s’enchaînent alors ensuite naturellement.

Les consignes, exposées en une unique explication collective, sont attentivement écoutées des élèves qui reformulent sans problème les objectifs à atteindre et les moyens pour y parvenir.

Le temps de travail d’écriture, silencieux, calme et serein permet à chaque enfant de progresser à son niveau et à son rythme en mettant toute son attention nécessaire sur le sens de ses lettres, le repérage des lignes et la hauteur des graphies, dans un souci de présentation finale soignée.

La parade des outils d’aide est systématique : chaque enfant sait comment et où trouver de l’aide. Les élèves sortent alors leur répertoire à portée de main pour l’expression écrite.

Ils vont chercher sans tarder les cubes pour manipuler leurs nombres.

Ils utilisent les crayons à triangulaire puisqu’ils reconnaissent leur difficulté à bien tenir le crayon et souhaitent rectifier cette mauvaise posture rapidement

Je souris : mes élèves n’ont pas le goût de la triche, de la mauvaise foi ni du travail bâclé.

 

… BIP ! BIP ! BIP !…

Ah ! Fichu réveil… 6 heures déjà, je viens à peine de me coucher… allez, je dois me dépêcher …

 

Je peste : j’ai mis une chaussette à l’envers et il a gelé sur ma voiture.

… TUTUT ! TUT !

Je stresse : les bouchons… j’ai tant de photocopies à faire !

 

J’arrive ENFIN à l’école…

Je meurs : panne de chauffage…

 

13 réponses

  1. Je suis tout à fait d’accord avec vous Claire et aussi avec vous Gudrun. Ce problème se trouve des deux côtés. Mais il faut admettre que c’est à nous ( les adultes ) à l’école comme à la maison, de donner le bon exemple.

  2. Je suis bien certaine que les élèves de leur côté font aussi des rêves. Des rêves dans lesquels la bienveillance, le respect, l’écoute, la compréhension, l’optimisme, le professionnalisme… et même la politesse (oui la politesse), seraient les qualités de tous leurs enseignants dans une École qui bannirait définitivement tout type d’humiliation et autres violences psychologiques pour favoriser ces émotions positives si indispensables aux apprentissages. Et quand leur réveil sonne et qu’ils se rendent compte (eux aussi) que ce n’était effectivement qu’un rêve nombre d’entre eux, et ils sont de plus en plus nombreux, décident de rester au lit pour fuir ce qui est véritablement devenu un cauchemar.

    1. Je suis assez d’accord avec vous. Parfois en tant qu’adulte, on pense avoir tous les droits sur les plus jeunes, y compris celui de décider de leurs actes voire même de leur pensée. Pourtant, ils grandissent surtout par l’opposition, le « non », le dépassement des limites à l’adolescence, l’affirmation de leur identité. Et cela, ce n’est pas toujours agréable pour ceux qui fréquentent l’individu grandissant. Pourtant, il faut l’accepter. Y compris lorsque l’on est enseignant et que l’on rêverait de n’avoir que des élèves parfaits, pas rebelles pour un sou, des élèves « bien rangés »…

    2. Je pense que vous n’avez pas saisi le fond de mon article et dénaturé sa forme.
      Je trouve cela bien dommage.
      Je ne demande ni des élèves parfaits, sans difficultés d’apprentissage ni ne souhaite les cloisonner derrière leurs bureaux sans collaboration ni entraide, répondant au doigt et à l’œil à mes commandes vocales !
      Ici, je dénonce le « cauchemar » des adultes éducateurs (ne sommes nous pas professeurs ?) face à la génération « d’enfants rois » : une génération du tout effort contre récompense (ex : le bonjour qu’apporte-t-il ?), partisan du moindre effort (exemple du manteau à terre), de la zéro frustration… La génération des enfants et parents à qui il faut arracher le bonjour (ironie du scintillant bonjour), ceux qu’ils ne faut pas punir/frustrer, les enfants rois de leurs envies, contrôleurs de leurs besoins (bien tenir le stylo…). Les enfants de la zéro contrainte, qui disent qu’ils n’ont pas envie de travailler, des parents indisciplinés (qui écrivent dans le mauvais cahier…), la génération du « tout tout de suite immédiatement sans attendre » (ex de la réponse réclamée…). Je dénonce l’enfant roi qui exprime « j’ai soif » et qui récupère un verre rempli d’eau dans la minute… (vocabulaire varié et politesse, respect des autres et du statut de chacun).
      Je dénonce la rareté du respect, de la citoyenneté, de l’entraide, du bien-être collectif sans intérêt, SPONTANE … des valeurs qu’il est malheureux, à notre époque, d’imposer ou de réclamer…

      Quant à l’espace pour l’initiative et la collaboration, je peux vous dire que ma classe est un vivier, une vraie fourmilière, pleine de rebondissements, d’élans d’improvisation et d’éclats de vie où l’on apprend par l’initiative (autonomie) et la collaboration (travaux de groupes et tutorat)… mais pour moi, ça, c’est un autre sujet…

  3. Je rajouterai que, ce matin-là dans ma classe, tous les élèves sont arrivés avec leur matériel scolaire au complet et en bon état, que les postes RASED ont été rétablis dans la nuit par Madame la Ministre, que « mon » AVS écrit enfin en cursive, avec une orthographe impeccable et sans oublier les accents le texte dicté par l’élève qu’elle assiste etc.
    Et, tiens, puisque l’on rêve: que mon salaire net avec primes (à défaut d’être aligné sur celui d’un PE allemand ou luxembourgeois) est devenu celui d’un certifié du second degré français au même indice.Pour finir ? Que la bienveillance et la confiance prônées par la hiérarchie à l’égard de nos élèves s’étendent aussi aux enseignants…On peut rêver.

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