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Bouleverser l'enseignement du FLE - Français Langue Etrangère

Je voudrais vous présenter la méthode FLE de ma collègue, Mme Leone qui enseigne au lycée I.S.I.S. « Fazzini/Mercantini » de Grottammare (Italie), qui est la seule enseignante de français langue étrangère que je connaisse à répondre «Jamais » à ma question : « Vous est-il arrivé d’avoir des élèves qui restent muets face à vos questions ? ». Pour elle, l’enseignement du FLE ne doit pas susciter l’ennui et il doit motiver les élèves à l’apprentissage en général. Ses élèves sont toujours demandeurs et ils progressent rapidement. Avec sa méthode, elle leur ouvre des horizons à n’en plus finir, elle les met en situation de progression constante. C’est un vrai bouleversement dans l’enseignement du FLE.

Le dur constat de l’état de l’enseignement des langues aujourd’hui

Le constat dont je fais état ci-dessous est lié à l’enseignement en France, mais aussi en Italie et peut-être dans d’autres pays du monde.

« On a un système super élitiste et unidimensionnel. On demande aux gens d’appartenir aux 5% des meilleurs (mais par définition, tout le monde ne peut pas y être), on les classe, et on considère que seuls le français, les maths et l’histoire comptent. On se fiche complètement qu’ils excellent en sport, en peinture, en musique, en conduite de projets…

Il y a donc très peu de gens qui ont l’impression d’être vraiment au top. Ils se voient comme étant en échec ou moyens. A force d’être éduqués avec cette échelle de 0 à 20, beaucoup finissent par se voir au milieu de l’échelle. »

Tel est le constat de Claudia Senik, professeur à l’université Paris-Sorbonne et à l’Ecole d’économie de Paris dont les recherches sur « l’économie du bonheur » sont en train de faire réfléchir.

Selon elle, l’enseignement des langues à l’école aujourd’hui est tel qu’il ne montre pas un grand enthousiasme pour le monde ; il nous empêche de nous sentir autant citoyens du monde qu’on le devrait. Au contraire, pour elle, il serait opportun de développer d’autres dimensions de la vie.

[Source : « Le malheur français, c’est quelque chose qu’on emporte avec soi » de Mathieu Deslandes]Tiré de http://www.rue89.com/2013/04/03/malheur-francais-cest-quelque-chose-quon-emporte-soi-241113

Enseigner le FLE aujourd’hui

Je trouve que son concept s’adapte parfaitement à l’enseignement du FLE aujourd’hui en Italie. En tant qu’enseignants, il nous appartient de motiver les apprenants et de leur ouvrir des horizons.

Ma collègue, Mme Leone, part du principe qu’en classe de langue, ni le prof, ni les élèves ne doivent s’ennuyer. En plus, il faut apprendre, c’est-à-dire progresser, acquérir des connaissances : les élèves doivent élargir leur culture générale. Sa langue de travail est le français langue étrangère.

Alors comment parvient-elle à les motiver pour qu’ils s’expriment oralement ? Pour qu’ils écoutent ? Tout simplement, en stimulant leur créativité. L’art d’enseigner le FLE, c’est de leur faire naître la nécessité de savoir. Le prof n’est pas un transmetteur de savoir. Les apprenants doivent être mis dans une situation d’apprentissage telle qu’ils doivent demander au prof des moyens pour s’exprimer.

La méthode FLE qui ouvre des horizons

méthode d'apprentissage en FLECreative Commons License photo credit: dalioPhoto

Concrètement, la méthode de ma collègue s’articule en 3 phases.

Présentation de matériel

La prof présente et donne du matériel aux élèves, écrit et oral. Son programme est organisé de telle manière qu’elle part d’une présentation de la France et de ses régions pour arriver à présenter une période historique en lien avec les œuvres littéraires et les événements au niveau artistique (œuvres d’art : peinture, architecture, musique, société, inventions) ainsi que les changements dans la société de la même époque. Elle présente aussi les attraits oenogastronomiques liés à la région analysée.

Les thèmes présentés sont abordés à partir de textes écrits tirés de livres d’histoire ou du manuel scolaire (compréhension écrite), de vidéos si possible sous-titrées (compréhension orale) tirées des émissions « Karambolage » d’Arte, ou des documentaires de TV5Monde, de TV5Europe, de « C’est pas sorcier »…

EXEMPLE DE PROGRAMME (pour une avant-dernière année de lycée, français comme seconde langue étrangère) :
– C. O. (compréhension orale) « Louis XV et la Marquise de Pompadour » (émission tirée de Superquark)
– C.E. (compréhension écrite) sur le progrès des sciences et des techniques et sur l’Encyclopédie. Dictée sur l’Encyclopédie.
– C.E. sur la monarchie en crise, le temps de Louis XV, la société et la peinture au XVIIIe siècle.
– C.O. « Le rébus Voltaire » tiré de Karambolage (durée : 4’)
– C.E. La peinture au XVIIIe siècle : Watteau (le rêve), Boucher (le maniérisme), Fragonard (peinture raffinée et poétique), La Tour (portrait), Greuze (peinture sentimentale), Chardin (peinture bourgeoise).
– C.O. sur Louis XV et les Illuministes de la Marquise de Pompadour.
– C.E. avec deux extraits de Candide ou l’Optimisme, 1759 : Il faut cultiver notre jardin, Le nègre de Surinam.
– Dictée : l’existence du mal
– C.O. « Le fauteuil Voltaire » (émission tirée de Karambolage. Durée : 4’)
– C.O. La place Stanislas à Nancy tirée de l’émission « Secrets d’histoire » de TV5Monde (Durée : 20’)
– C.O. Histoire du style du mobilier II (émission tirée de Karambolage. Durée : 4’)
– C.O. Le Panthéon (reportage tirée de « Le plus grand Musée du Monde » TV5Monde)
– C.E. sur la Lorraine.
– C.O. « La quiche lorraine » et « les mines de sel », deux émissions tirées de Cuisine du Terroir (TV5Monde) durée : 20’
– C.O. « Lapin sauté aux mirabelles », recette de Sarah Wiener (Arte)
– C.E. sur la chronologie de la révolution française et l’avènement de la République
– C.E. sur la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen.
– C.O. « La quiche lorraine » et « les mines de sel », deux émissions tirées de Cuisine du Terroir (TV5Monde) durée : 20’
– C.O. « Lapin sauté aux mirabelles », recette de Sarah Wiener (Arte)
– C.E. sur la chronologie de la révolution française et l’avènement de la République
– C.E. sur la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen.

Cette étape peut durer un mois, voir deux.

Que font les élèves durant cette première étape ? Ils prennent des notes, enrichissent leur vocabulaire et leurs connaissances culturelles.

La restitution individualisée et personnalisée du savoir

La prof demande alors à ses élèves de faire un exposé oral sur tout ce qu’elle a présenté. Les étudiants vont reprendre les notes prises durant le cours, les réélaborer à leur manière en leur redonnant la chronologie de leur choix. Ils choisissent quoi dire et comment le dire.

Les élèves se rendent ainsi compte qu’ils ont besoin de moyens pour pouvoir s’exprimer. Ils vont s’informer sur la prononciation correcte, sur le vocabulaire adéquat et mettre naturellement en place une auto-correction.

Le jour de l’exposé, la prof peut leur poser quelques questions mais celles-ci portent sur un approfondissement métalinguistique, pas sur le contenu dont elle leur laisse l’entière responsabilité.

L’évaluation

Pendant l’exposé, la prof n’interrompt pas l’exposition mais elle prend des notes et à la fin, dans un sens toujours positif, valorisant, jamais négatif, elle présente les fautes et demande l’auto-correction.

Sa méthode est d’autant plus utile qu’elle se relie parfaitement au programme des autres matières : les profs d’histoire et d’histoire de l’art traitent, durant cette année scolaire-là, la même période historique. De même, le professeur d’italien traite la même période littéraire, etc.

En classe, les élèves ont différents niveaux. Mais ce qui me frappe le plus, c’est que tous mûrissent et accroissent leur savoir. Elle sait élargir les horizons. Elle ne leur apprend pas seulement le français mais aussi la vie de nos ancêtres, la culture, la civilisation… Et si un élève n’excelle pas en français, il s’intéresse sûrement à un autre aspect présenté pendant le cours de français… C’est peut-être ça le but de l’enseignement, non ?

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